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Quel accès aux droits sociaux et économiques pour les femmes migrantes monoparentales confrontées au manque de places en crèches ?

©Photo Le Monde des Possibles

Charlotte Poisson

© Une analyse de l’IRFAM, Liège, 2024.

Pour citer cette analyse
Charlotte Poisson, « Quel accès aux droits sociaux et économiques pour les femmes migrantes monoparentales confrontées au manque de places en crèches ? », Analyses de l’IRFAM, n°1, 2024.

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L’année électorale 2024 est l’occasion de mobilisations citoyennes, associatives et d’interpellations politiques1notamment sur différents enjeux de société liés à l’accueil de la petite enfance. Sans solutions pérennes depuis des années, la problématique du manque récurrent de places d’accueil en crèche concourt à faire perdurer les inégalités sociales et économiques désavantageant les citoyens et citoyennes vivant des situations de précarité. Cette pénurie de place en crèche touche à des enjeux de société majeurs et à la manière dont les politiques publiques en tiennent compte (ou non). A Bruxelles l’on dénombre 65 000 familles monoparentales et à la tête de ces familles, on retrouve 86 % de femmes (dont une part notable d’immigrées). Il devient dès lors compliqué d’ignorer un lien direct entre le problème de pénurie de places en crèches et l’insertion sociale et professionnelle de ces femmes. Aborder le sujet du manque de place en crèche, entraine donc de facto de se pencher sur les questions des droits des femmes et de l’égalité des genres, de l’intégration sociale et professionnelle des personnes immigrées et donc des politiques liées au genre, à l’emploi, à l’enseignement, à la formation, à la résorption du chômage… en période de pénuries de main-d’œuvre.

Pour cette analyse, nous avons rencontré un groupe de quinze femmes immigrées avec enfants qui ont été confrontées récemment ou par le passé au manque de place en crèche. Nous avons également mené des entretiens auprès de cinq mamans migrantes en situation de monoparentalité. Nous questionnons ici les conséquences que peut avoir le manque de place en crèche pour les mamans migrantes monoparentales par rapport à leur accès aux droits sociaux, culturels, de formation et d’emploi. Nombre de ces constats sont valables pour les mamans migrantes en générale mais les obstacles sont plus aigus pour celles qui sont monoparentales. Grâce aux témoignages recueillis auprès de mères concernées, nous pourrons mettre en exergue des situations de vie, des obstacles spécifiques et des demandes formulées pour tendre vers plus d’égalité d’accès aux droits fondamentaux.

Structure genrée et ethnostratifiée du monde socio-économique : les femmes défavorisées

En raison de la structure genrée du monde socio-économique et des familles, la garde d’enfants représente une condition préalable à la participation sociale et citoyenne des femmes, ainsi qu’à leur insertion sur le marché de l’emploi. Cet obstacle est d’autant plus prégnant dans le cas des familles monoparentales. Or, les ménages de la Région wallonne et de Bruxelles-Capitale comprennent 12 % de familles monoparentales, et cette proportion est croissante depuis la fin des années 19902. Par ailleurs, dans plus de huit cas sur dix, l’unique parent est une femme, comme le montrent les données des ménages d’IBSA Brussels (2022). Tandis que, dans la population générale, la monoparentalité est facteur de précarisation, le cumul du statut de famille monoparentale et famille issue de l’immigration influence d’autant plus négativement les conditions de vie de ces ménages, particulièrement en ce qu’il complique la garde des enfants en bas âge. Les femmes issues de l’immigration ayant la charge de ces foyers sont donc confrontées à des discriminations multiples et intersectionnelles qui entravent leur intégration (langue, non-reconnaissance des diplômes et des expériences, traumas, inadaptation du soutien). De plus, les migrantes se voient présenter des emplois dans des secteurs en pénurie de main-d’œuvre (entretien, soins, HORECA) qui fonctionnent bien souvent selon un horaire différent des crèches.

La Ligue des familles, dans un rapport de 2021 portant sur la question de la garde des enfants lorsque les parents travaillent à horaires décalés, l’observe : les familles monoparentales (majoritairement des mamans) auraient grandement besoin de solutions de soutien afin de pouvoir concilier travail et vie de famille, « pourtant, actuellement, aucun dispositif spécifique n’est prévu pour les soutenir ». Ainsi, la difficulté, voire l’incompatibilité de concilier les horaires d’une formation ou d’un emploi à temps plein et une vie familiale amène de nombreux parents, lorsqu’ils le peuvent, à réduire leur temps de travail, afin de mieux pouvoir assumer la garde de leurs enfants. Très fréquemment, en raison notamment des stéréotypes de genre, ce sont les femmes qui sont les premières à réduire leur engagement professionnel pour s’occuper de leurs enfants et de leur famille.3

Manque de place en crèche : de quoi parle-t-on ?

En Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), les parents ou figures parentales responsables d’enfants en bas âge ont différentes possibilités de garde, publiques ou privées, collectives ou « familiales ». Les conditions d’accueil, horaires et tarifs pratiqués, activités et projet pédagogique proposés peuvent varier d’une structure à l’autre. En FWB, deux types de structures d’accueil se distinguent par leur mode de financement : les unes sont subventionnées par l’ONE et les autorités publiques (via des postes APE…) et les autres ne le sont pas (financement privé). Au total, au 31/12/2021, l’offre de places d’accueil au sein de la FWB était de 46 222 places4, dont 34 422 places subventionnées par l’ONE ou assimilées et 11 800 places non subventionnées. Pour les crèches et les accueillantesconventionnées,une grille tarifaire établie par l’ONE détermine la participation financière des parents en fonction de leurs revenus. Notons qu’une aide est accordée depuis le 1er janvier 2023 aux familles monoparentales avec une réduction de 30 % des coûts de garde et la gratuité pour les familles à faible revenus. Les lieux d’accueil non subventionnésqui proposent un accueil collectif ou familial sont constitués de crèches privées et d’accueillantes indépendantes ayant reçu une autorisation de l’ONE. Ces milieux d’accueil pratiquent librement leurs tarifs et sont considérés pour certains comme moins stables5ce qui contribue à fragiliser davantage encore ce secteur.

Selon le Baromètre des parents 2022 publié par La Ligue des familles, « 39 % des parents n’ont pas pu trouver une place en crèche au moment qui leur convenait ». Les dernières estimations mettent en avant un manque de 5 200 places (2000 à Bruxelles et 3 200 en Wallonie) que la FWB souhaite combler d’ici à 2025. Sylvie Anzalone, porte-parole de l’ONE rappelle que certaines zones géographiques sont suffisamment pourvues en places alors que d’autres souffrent d’un manque criant et doivent faire face à une demande grandissante. Le taux de couverture (nombre de places d’accueil/nombre d’enfants de la tranche d’âge concernée) en Wallonie en 2021 est de 37 % (soit 37 places pour 100 enfants) avec une grande disparité selon les régions. Le taux de couverture le plus élevé se situe dans la province du Brabant wallon (53 % en 2021). En provinces du Hainaut et de Liège, bien qu’il y ait eu une progression ces dernières années, le taux de couverture est faible et atteint respectivement 32 % et 37 % (IWEPS, 20216). Si l’on tient compte uniquement des places d’accueil subventionnées par l’ONE, le taux de couverture général tombe à 28 %. Le contrat de gestion7 2021-2025 de l’ONE demande la création de nouvelles places pour améliorer le taux de couverture des places subventionnées qui reste inférieur à l’objectif fixé, il y a plus de 20 ans8 par l’Europe à savoir 33 %, lui-même trop faible. En effet, cet objectif européen repose sur le postulat qu’une place d’accueil suffit pour un peu plus de trois enfants de la tranche d’âge, partant du principe qu’un nombre important de femmes travaillent à temps partiel et peuvent donc s’occuper de leur enfant. Il faudrait pourtant atteindre au minimum un taux de couverture de 50 % par commune pour répondre aux besoins des familles, selon Emmanuelidis (2021, p. 5).

Bien que le nombre de places d’accueil de la petite enfance ait progressé depuis 2004 en Wallonie et à Bruxelles, particulièrement grâce aux Plans « Cigogne » successifs de l’ONE dans lesquels le rééquilibrage entre les sous-régions était un enjeu important, celui-ci a subi des baisses ces dernières années : « le nombre total de places d’accueil est, en fait, en chute depuis cinq ans. Entre 2019 et 2023, la Fédération Wallonie-Bruxelles a perdu près d’un millier de places d’accueil. Il en reste ainsi un peu moins de 46 000 en tout contre près de 47 000 en 2019, avant la crise du Covid » (Mergen S., RTBF, 2023). Emmanuelidis (2021) rappelle que la subvention en infrastructures apportée par la Région wallonne ne couvrant pas la totalité du coût (le taux d’intervention est fixé à 80 %), il n’est pas certain que toutes les places prévues soient créées, par manque de candidats qui répondront aux appels à projets. Pour certaines communes déjà en difficultés financières, notamment celles situées en Province de Liège, à la suite des inondations de 2021, la création de places d’accueil ne sera peut-être pas une priorité.

Un cercle infernal : « avoir un travail pour avoir une place en crèche, avoir une place en crèche pour pouvoir travailler »

Alors que l’on sait que les personnes migrantes, en Belgique francophone, ont un taux d’emploi inférieur à la moyenne belge9 et bien en dessous de la moyenne européenne, ce constat est d’autant plus vrai pour les femmes migrantes10 dont le taux d’emploi est encore plus bas bien qu’elles veuillent travailler. Les femmes migrantes monoparentales se trouvent confrontées à un engrenage dans lequel le fait d’avoir un travail facilite, voire conditionne l’accès à une place en crèche et le fait d’avoir une place en crèche rend possible ou du moins facilite grandement l’insertion sociale, la participation citoyenne et l’emploi. Judith, maman d’un enfant de deux ans explique :

« Comme je n’ai pas de travail, je ne suis pas prioritaire sur la liste d’attente pour avoir une place en crèche pour mon enfant. Et comme je n’ai pas de place en crèche, je dois prendre mon enfant partout avec moi. Toutes les démarches deviennent très compliquées ; aller à la commune, suivre un cours de français, se rendre à une séance d’infos pour une formation, postuler à un emploi. »

Les cinq mères solos rencontrées témoignent du fait qu’elles ont eu soit tardivement connaissance de l’existence des crèches et des activités extra-scolaires pour leurs enfants soit qu’elles n’ont pas trouvé de places en crèches, ce qui a eu des conséquences sur leurs engagements dans le but de reprendre une formation ou de chercher de l’emploi. Le témoignage d’Édith, maman célibataire de trois enfants, en Belgique depuis dix ans, illustre particulièrement cette situation.

« Quand mes enfants étaient petits, je m’étais inscrite à une formation de bureautique. J’avais trouvé une solution pour faire garder mes deux enfants qui n’allaient pas encore à l’école. Mais un jour l’amie qui les gardait m’a appelé d’urgence pendant ma formation pour que je revienne à la maison. J’étais tellement embarrassée auprès du formateur, car il avait dit qu’on ne pouvait pas avoir d’absences. Je me suis excusée, il a compris, mais m’a dit que je ne pourrai plus revenir, car je n’étais pas assidue. J’ai dû rentrer à la maison et là je me suis vraiment dit que mes chances de suivre une formation et puis de trouver un emploi étaient quasi nulles, j’étais au bord des larmes. Même si je suis motivée, même si je cherche des formations, s’il y a une urgence avec un enfant et qu’on est la seule personne à pouvoir gérer, on doit y aller, quitter la formation, annuler l’entretien d’embauche. On n’a pas d’autres solutions. C’est très dur. »

De plus, les femmes immigrées se voient majoritairement proposer des emplois (nettoyage, vente, soins aux personnes…) dont les horaires, souvent en soirée ou le weekend, ne correspondent pas aux horaires pratiqués par les crèches ce qui complique davantage leur entrée dans l’emploi. La recherche de solutions est laissée à l’individu alors que le problème est collectif comme en témoigne Alya :

« J’ai commencé à travailler comme technicienne de surface en hôpital. Mais j’ai dû arrêter c’était pas possible. On m’avait dit “pour les enfants tu dois toi-même trouver une solution”. On a des horaires parfois tôt le matin, parfois de journée ça c’est bien, mais parfois le soir aussi. Si je dois arriver à six heures du matin pour prendre mon service, je ne peux pas conduire mon enfant à la crèche et il n’y a même pas de crèche qui ouvre à cette heure-là. Comment je fais ? J’ai déjà parfois même pas de bus qui peut m’emmener au travail. »

On voit des problématiques qui s’entrecroisent pour les mamans qui gèrent seules le quotidien, leur travail et leurs enfants. La question de la mobilité en est une et non des moindres quand on sait que les grandes entreprises en demande de main-d’œuvre sont souvent situées dans des zonings excentrés et difficilement accessibles en transport en commun. Souvent sans véhicule personnel, parfois sans permis (ou avec un permis non reconnu en Belgique), les femmes migrantes monoparentales sont confrontées à cette difficulté qui entrave leurs possibilités de participation sociale et professionnelle. C’est une des revendications de Samira, maman solo d’un petit garçon de trois ans, qui demande aux politiques de soutenir les femmes migrantes qui voudraient passer leur permis de conduire11.

« Je suis des cours pour passer le permis de conduire. Je vois que c’est un problème pour beaucoup de mamans que je connais. Il faut soutenir les femmes qui veulent passer leur permis et donner des cours de conduite dans d’autres langues que le français. Moi, si j’avais une voiture cela me permettrait de faire beaucoup de choses pour mon fils. »

Son enfant fréquente depuis peu l’école du quartier ce qui a changé considérablement le quotidien et les perspectives de Samira.

« Avant, quand mon fils était tout petit, je n’avais pas de place en crèche. Je ne savais même pas qu’il y avait des crèches, que j’aurais dû m’inscrire quand j’étais encore enceinte. Je ne pouvais rien faire, j’étais seule, je restais toute la journée à la maison avec lui. Comment j’aurais pu faire garder mon enfant ? Dans les cas d’urgence, je demandais à ma voisine de le garder. Mais je ne pouvais pas abuser ».

Quand son enfant a commencé l’école, Samira s’est renseignée pour suivre une formation qui l’aiderait à trouver du travail. C’est ainsi qu’elle s’est inscrite en septembre à une formation et a réalisé un stage professionnel dans une cuisine de collectivité. Mais là aussi elle évoque des difficultés spécifiques liées au fait de s’occuper seule de son enfant.

« Les horaires et les déplacements en bus étaient très compliqués à gérer. Pourtant j’habite Liège, l’école de mon fils est dans mon quartier et mon stage était à Liège aussi. Mais quand même, je suis seule avec mon fils, personne ne peut m’aider. Les horaires de l’école et ceux du stage étaient difficilement compatibles. Je commençais le travail à 7 h du matin pour finir à 15 h. La garderie de l’école n’ouvrait qu’à 7 h 30, j’ai dû demander pendant trois semaines l’aide de voisines et connaissances qui pouvaient emmener mon enfant à l’école. Mais c’est impossible à faire tout le temps. Je me suis rendu compte qu’en étant maman seule, je ne pourrai pas accepter d’emploi à temps plein ».

Pièges à l’emploi12

Ces témoignages illustrent bien les problématiques et situations ambivalentes dans lesquelles se trouvent les femmes migrantes seules en charge d’enfants qui cherchent un travail. Que gagnent-elles à travailler dans des emplois souvent peu qualifiés et physiquement éprouvants, dont les conditions d’horaires et de salaires ne sont ni avantageuses ni valorisantes13 et qui, en plus, compliquent leur organisation quotidienne avec leurs enfants ? En parallèle, les revenus de remplacement et les prestations sociales auxquelles elles peuvent avoir droit en tant que familles monoparentales ou bénéficiant du statut BIM (Bénéficiaire de l’intervention majorée) engendrent une réflexion légitime en termes de « coût-bénéfice » dans laquelle les propositions d’emplois précaires qui leur sont adressées pèsent peu de poids dans la balance (Eremenko et al. 2017, p.210). Certaines d’entre elles, comme Brigitte nous le raconte ici, préfèrent dès lors reporter leur entrée en formation ou en emploi quand leurs enfants seront plus grands.

« Je suis seule avec trois enfants. Mon mari est au pays. J’ai fait cette formation, car je voulais vraiment travailler, gagner un salaire, être autonome. Ensuite, on m’a proposé un contrat pour un emploi de technicienne de surface. J’ai dû faire un calcul, j’étais obligée, car je paye une personne pour garder mes enfants quand je dois commencer à travailler tôt le matin ou quand je finis tard le soir. Je dois voir combien tout ça me coûte. Et j’ai remarqué que je ne gagnais pas beaucoup plus d’argent en fait si j’acceptais ce contrat. Le salaire n’est pas très élevé et je perds mon statut BIM, les réductions que cela entraine pour les abonnements de bus, les factures d’électricité… »

Étant donné que ce sont davantage les migrants et en particulier les migrantes qui occupent des emplois peu qualifiés, à bas salaires, avec des contrats précaires et atypiques, et ce sont elles aussi qui ont majoritairement la charge des enfants et se retrouvent à la tête de familles monoparentales, il y a lieu de créer les conditions nécessaires afin de diminuer les inégalités d’accès à des emplois durables et de qualités pour les femmes et augmenter l’accessibilité à des solutions de garde d’enfants adaptées aux situations individuelles.

Conclusion

Si l’on souhaite soutenir l’accès aux droits des femmes et à plus forte raison des migrantes, leur insertion sociale et professionnelle, nous devons inclure dans les réflexions la problématique de la garde d’enfants (Hugret et Manço, 2022). En 2022, l’Institut fédéral pour l’égalité des genres lançait l’appel à projet « Bread and Roses » visant à « favoriser l’inclusion et le maintien durable des femmes en situation de vulnérabilité en tant que salariées et/ou en tant qu’indépendantes sur le marché du travail ».  Le projet WOW mené conjointement par Le Monde des Possibles et l’IRFAM incluant une recherche-action sur la problématique de la garde d’enfant a ainsi pu être soutenu et inclure un large travail de réflexion autour de cet enjeu. Car il s’agit d’imaginer des politiques publiques (de l’emploi, de la formation, de la santé, du logement, de la mobilité…) qui intègreraient systématiquement dans leur réflexion le sujet de la garde d’enfants afin de garantir une participation des femmes et la représentativité de leurs préoccupations propres.

Déjà en 1966, les travailleuses de la FN Herstal se mettaient en grève pour revendiquer d’une part des salaires égaux aux hommes pour la même tâche, mais aussi des garderies dans les écoles et la création de crèches. Cet impensé de l’époque, toujours d’actualité, met à mal la participation sociale et citoyenne des femmes et entrave leur insertion socioprofessionnelle. Un des défis majeurs des politiques d’accueil de la petite enfance, comme celui des ATL (Accueil Temps Libre), pour les années qui viennent sera celui de l’accessibilité, nécessitant une compréhension fine et détaillée du phénomène de « non-recours » aux services, des facteurs explicatifs et déclencheurs afin de réduire les inégalités d’accès aux structures d’accueil de la petite enfance pour les personnes vivant des situations de précarité, dont font partie les femmes migrantes monoparentales.

Bibliographie

Emmanuelidis R., (2021), « Milieux d’accueil de la petite enfance (0-3 ans) : Les enjeux prioritaires du nouveau contrat de gestion de l’ONE 2021-2025 », Namur, CEPAG.

Eremenko T. et al., (2017), « Organiser la garde des enfants quand on est mère seule : une spécificité des mères immigrées ? », Revue française des affaires sociales, n°2, pp. 207 à 228.

Gautier C. (2023) « La crèche, un puissant lieu de pouvoir », n° 30, Médor, p. 38-45.

Hugret M. et Manço A., (2022), « L’accueil d’enfants de parents immigrés : effets sur l’accès à l’emploi et l’égalité hommes/femmes », Analyses de l’IRFAM, n° 7.

Vandenbroek, M., (2021), « Les lieux d’accueil et d’éducation du jeune enfant qui peuvent faire la différence », Université de Gand.

Wagener et al., (2022), « Non-recours aux services d’accueil temps libre et aux milieux d’accueil de l’ONE », Bruxelles, ONE.

Wagener, M., (2013), « Les femmes monoparentales face aux inégalités d’accès aux activités extrascolaire », Analyse n° 15, RIEPP, Bruxelles, Louvain-la-Neuve.

Wagener, M., (2013), «  Les femmes monoparentales face au manque de places d’accueil pour les enfants de moins de trois ans », Analyse n° 13, RIEPP, Bruxelles, Louvain-la-Neuve.


Notes

  1. Voir à ce sujet la campagne menée par La Ligue des Familles « Pour en finir avec le manque de places en crèches » répertoriant sur une carte interactive le nombre exact de places en crèche disponibles par commune pour 100 enfants, visant ainsi à interpeller les politiques. Les communes les mieux couvertes se trouvent dans le Brabant wallon (Ottignies, Louvain-la-Neuve a une couverture de 100 %, La Hulpe est à 99 %, Lasne et Rixensart suivent avec 84 et 67 places pour 100 enfants). Les communes les moins bien loties se trouvent dans le Hainaut et en Province du Luxembourg avec, pour certaines communes moins de 10 places pour 100 enfants (commune de Manage, par exemple).
  2. En Belgique francophone, fin 2020, les familles monoparentales étaient 194 986[2] contre un peu plus de 432 000 familles duo-parentales, ce qui représente un bond de plus 10 000 familles en 10 ans (BCSS, 2024).
  3. « Les chiffres de l’ONEM indiquent qu’une large majorité des demandes d’interruption de carrière ou de congé thématiques sont émises par des femmes (64 % en 2020). Dans le Baromètre 2020 de la Ligue des familles (p. 21), à la question “Qui garde les enfants en cas de maladie ?”, une distinction de genre se manifeste à la lecture des réponses fournies par les parents : les pères sont 39 % à affirmer qu’ils gardent leur enfant en cas de maladie, contre 55 % des femmes. Tandis que les hommes sont 45 % à indiquer que leur conjointe s’occupe également des enfants dans ces situations, les femmes sont seulement 26 % à en dire autant. On constate donc que les femmes sont en première ligne pour garder les enfants malades. » (La Ligue des familles, 2021, p. 7).
  4. Les chiffres sont tirés du Rapport d’activités 2021 de l’ONE.
  5. Voir à ce sujet l’analyse d’A. Dubois, « Pourquoi l’offre d’accueil de la petite enfance reste-t-elle insuffisante ? », 2016, Bruxelles, CERE.
  6. L’IWEPS n’a pas encore publié la mise à jour de ces chiffres qui devaient pourtant être rendus publics au 1/07/2023.
  7. En juin 2021, le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles adopte le nouveau contrat de gestion de l’ONE qui s’étale sur la période 2021-2025. Ce texte vise particulièrement à améliorer l’accessibilité, augmenter le nombre de places en crèche, sujet récurent s’il en est, ainsi qu’à renforcer la qualité des milieux d’accueil. Le texte se penche aussi sur l’amélioration des conditions de travail du personnel des milieux d’accueil de la petite enfance et souhaite faire passer l’ensemble des accueillantes conventionnées sous le statut de salariées, ce qui ne fait pas l’unanimité chez les personnes concernées.
  8. Gautier C. (2023) « La crèche, un puissant lieu de pouvoir », n° 30, Médor, p. 38-45.
  9. La Belgique francophone se caractérise par un taux d’emploi (64 %) en deçà de la moyenne européenne (73 %). Dans ce contexte, et depuis plus de dix ans, le taux d’emploi des personnes issues d’un pays hors UE est lui-même inférieur à 50 %, soit plus de 20 points de pourcentage de moins que les personnes nées en Belgique. D’après le Conseil supérieur de l’emploi, il s’agit de la troisième plus mauvaise position après les Pays-Bas et la Suède, pays qui, à la différence de la Belgique, connaissent un taux d’emploi global élevé (Khadija Senhadji, Monitoring selon l’origine nationale, Actiris, 2019).
  10. Les femmes connaissent un taux de chômage plus élevé que les hommes de la même origine, mais elles subissent aussi plus fréquemment des situations d’inactivités puisqu’elles sont, de manière globale, à la fois moins souvent à l’emploi et moins souvent inscrites comme chercheuses d’emploi (Khadija Senhadji, Monitoring selon l’origine nationale, Actiris, 2019).
  11. Soulignons l’initiative du Relais Familles Monoparentales qui soutient les parents solos qui veulent passer leurs permis de conduire en organisant des moments d’étude collective à Liège.
  12. Castaigne, M. « Les pièges à l’emploi : quand travailler coûte. Analyse d’une remise à l’emploi pas toujours simple pour les bénéficiaires du revenu d’intégration », 2023, Fédération des CPAS.
  13. Les femmes d’origine non UE sont « confrontées à une triple vulnérabilité. Elles ont une probabilité plus grande d’être au chômage ou une fois à l’emploi, d’être confinées dans des métiers faiblement rémunérateurs, peu gratifiants, exigeants physiquement (Horeca, soins, nettoyage) » Khadija Senhadji, Monitoring selon l’origine nationale, Actiris, 2019.

Charlotte Poisson